Un qanat est un ouvrage (de type minier) destiné à la captation d'une nappe d'eau souterraine et l'adduction d'eau vers l'extérieur. Un qanat est constitué d'un ensemble de puits verticaux (accès, aération) reliés à une galerie de drainage légèrement en pente qui achemine l'eau vers des citernes ou une exsurgence. Pour les populations de régions arides ou semi-arides, un qanat constitue une source d'eau constante et régulière, quelle que soit la saison, et il permet par exemple l'irrigation de cultures agricoles.
La technique du qanat a été développée en Perse vers le début du Ier millénaire avant notre ère, puis elle s'est répandue lentement vers l'est et l'ouest. On trouve ainsi de nombreux qanat en Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Libye), au Moyen-Orient (Iran, ), et plus à l'ouest de l'Afghanistan et l'Inde jusqu'à la Chine. Historiquement, la majorité des populations d'Iran et d'autres régions arides d'Asie ou Afrique du Nord était dépendante de l'eau fournie par les qanats ; les espaces de peuplement correspondaient ainsi aux lieux où la construction de qanat était possible.
Le terme « qanat » est utilisé par les scientifiques francophones pour désigner globalement ce type d'ouvrage, sans référence à une région géographique particulière. Ce terme dérive du qanāt du persan moderne (قنات) ou de l'arabe (قناة). Historiquement, le terme kheltara était utilisé en français pour désigner les galeries drainantes du Maroc, foggara pour les galeries du Sahara1.
Il est admis que « qanat » a pour origine l'akkadien qanu qui signifie « roseau », qui donna l'araméen qana. Ce terme est ultérieurement repris dans des langues sémitiques et non sémitiques, comme le grec ancien (κάννα), le latin (canna), l'arabe (قناة qanat) mais il semble absent dans l'ancienne langue persane. Il est remarqué que la variante latine cannalis signifie « qui a la forme d'un roseau » et prenait aussi le sens de « tuyau, galerie »1. Le mot qanat est aussi le terme le plus courant dans la langue persane moderne et son dérivé moqani désigne l'artisan constructeur de qanat.
La galerie drainante est également appelée kārīz (du persan كاهریز) ou kārēz (كاریز) en Iran, Afghanistan, Pakistan et Asie Centrale ; kahan (du persan کهن) ou kahriz/kəhriz en Azerbaijan, foggara ou fughara en Afrique du Nord (Algérie), khettara au Maroc, galería en Espagne, falaj aux Émirats Arabes et Oman ; kahn au Baloutchistan. D'autres termes existent en Asie et Afrique du Nord, tel que kakuriz, chin-avulz et mayun.
Les qanats constituent peut-être l'avancée technique la plus importante de toute l'histoire de l'irrigation en Iran. Les premiers d'entre eux auraient été creusés au nord-ouest du plateau iranien vers la fin du Ier millénaire av. J.‑C., à partir de techniques minières. D'après Henri Goblot, les mineurs de charbon avaient développé ce système de canaux afin d'extraire l'eau2 des mines3.
Le qanat, qui est comparable à un aqueduc souterrain, s'est ensuite répandu sur le plateau iranien et encore plus loin au temps des achéménides, permettant d'ouvrir de nouvelles zones au peuplement humain.
Malgré les variations de caractéristiques (longueur, profondeur, type de sol creusé…) que l'on peut trouver entre les qanats, ils mesurent typiquement plus de 500 m et le "puits mère" où commence le canal est profond de plus de 10 m. Le plus long qanat connu mesure plus de 50 km (à Kerman) et le puits mère le plus profond mesure plus de 300 m (à Gonabad). Yazd, Kerman et Gonabad sont les zones les plus connues pour leur dépendance à un système extensif de qanats.
L'écoulement souterrain évite deux problèmes : l'évaporation et le développement de formes organiques non souhaitées.
Un āb anbār est un réservoir traditionnel d'eau potable en Iran.
Pour supporter la pression que l'eau exerce sur les parois du réservoir de stockage, le lieu de stockage lui-même était construit sous le niveau du sol. Un autre aspect important à prendre en considération est leur résistance aux tremblements de terre ; car la plupart des villes d'Iran sont situées dans des régions ayant été victimes de ces tremblements. Le fait que les ab anbar soient construits dans des structures enterrées leur donne une structure stable.
Les matériaux utilisés pour la construction des ab anbars était très durs et utilisaient un mortier spécial appelé sarouj, qui était constitué de sable, d'argile, de blancs d'œuf, de citrons verts, de poil de chèvre et de cendres dans des proportions spécifiques, et qui varient selon les villes et les régions. Cette mixture était réputée complètement imperméable. Les murs de la citerne faisaient souvent 2 mètres d'épaisseur, des briques spéciales devant être utilisées pour leur édification. Ces briques étaient construites spécialement pour les āb anbār et étaient appelées Ajor āb anbāri.
Cette structure en forme de dôme semi-enterré servait la plupart du temps à stocker de la glace, mais aussi parfois à stocker de la nourriture.
Dans l'Iran du IVème siècle av. J.-C., les ingénieurs persans maîtrisaient déjà la technique permettant de stocker de la glace en plein été dans le désert. La glace était amenée des montagnes environnantes pendant l'hiver et était ensuite stockée dans des réfrigérateurs spécialement conçus et naturellement réfrigérés, appelés yakhchal, qui signifie stockage de glace.
Cette structure consiste en un grand espace enterré (jusqu'à 5000 m³) aux murs épais d'au moins deux mètres à la base, faits avec un mortier spécial appelé sarooj, composé de sable, d'argile, de blanc d'œuf, de chaux, de poils de chèvre et de cendres, résistant aux transferts de chaleur. Cette mixture est imperméable.
Cet espace était souvent relié à un qanat et possédait aussi souvent un badgir (tour à vent) qui pouvait abaisser les températures pendant les jours d'été. La glace stockée était ensuite utilisée pour fabriquer des rafraîchissements pour la cour royale.
Parmi celles qui subsistent aujourd'hui, nombreuses sont celles qui ont été construites il y a plusieurs centaines d'années.
Ces relais créés pour répondre aux besoins des voyageurs et des caravaniers datent de l’époque des Achéménides. Hérodote parle d’une voie entre Suse et Sared qui comptait, sur une distance de 2500 km, 115 bâtiments qui ressemblaient à des caravansérails ou à des relais pour le changement de monture des courriers.
La période des Sassanides marque un essor important dans l’architecture de ces relais avant la période islamique. A cette époque, le développement économique nécessite la construction de routes et une plus grande sécurité pour les caravanes de commerce.
Des vestiges importants de ces caravansérails comme "Dir Goltchin" se trouvent sur la route de Téhéran-Qom. On peut également apercevoir "Robat Anou Shirvân" sur la route de Semnân-Damghân, qui était sur le parcours de la route de la soie, ainsi que "Darvâzeh Gadj" et "Kenâr-e-Siâ" dans la région de Fars.
Ils comportent généralement quatre cours et sont le plus souvent faits de pierres à chaux, de mortier et de craie.
La période islamique connut une recrudescence de l’édification de caravansérails pour des raisons économiques, religieuses et militaires. Leur architecture s’aligna sur celle des mosquées et des madreseh (écoles islamiques), avec deux ou quatre cours. Parmi les plus remarquables de ces caravansérails, on peut citer celui de Sharaf,-qui est un robat, c’est-à-dire un genre de caravansérail ressemblant à une forteresse dotée de coupoles-, le Khorassân, dont il ne reste malheureusement plus grand chose aujourd’hui.
Des caravansérails furent construits après les invasions mongoles, à l’époque de Ghazân Khân et des Timourides.
A l’époque des Safavides, les caravansérails se développèrent à l’intérieur des villes et étaient aussi des lieux de commerce et d’échanges. Un manuscrit conservé au musée de Londres évoque la présence de quarante caravansérails uniquement dans la ville d’Ispahan.
La période safavide marque une transformation architecturale des caravansérails, avec l’apparition d’un plan hexagonal orné des quatre cours traditionnelles.
A l’époque des dynasties Zand, Afsharide et Qâdjâre, les caravansérails connurent d’importantes transformations : ils conservèrent les quatre cours mais furent désormais construits en pierres cuites. Ils étaient entourés d’un mur très haut qui protégeait les voyageurs lors des attaques et invasions. A l’intérieur du caravansérail se trouvait une muraille de pierres et un portail qui donnait sur une cour, elle-même entourée de pièces réservées aux serviteurs. La cour était entourée de dépôts servant à conserver les produits et les marchandises des commerçants, d’écuries et de granges à foin destinées à l’alimentation des bêtes. La boutique du maréchal-ferrant et un café se trouvaient également dans la cour du caravansérail.
Les voyageurs étaient logés aux étages supérieurs où certaines chambres particulières dotées de bains et de toilettes étaient louées à un prix plus élevé. Le milieu de la cour était généralement agrémenté d’une petite mosquée. Dans les grands caravansérails, la cour donnait sur des salles couvertes utilisées en hiver. Les plafonds avaient la forme de coupoles avec un orifice au sommet pour la luminosité et l’aération. Des cheminées ouvertes permettaient aussi la cuisson des repas. Les petits caravansérails n’avaient pas de cour et l’entrée ouvrait directement sur des pièces ou alcôves au plafond voûté, entourées de colonnes. Les animaux étaient attachés en bas et l’étage supérieur servait de chambre aux voyageurs
Certains caravansérails ont conservé aujourd’hui un rôle économique proche de celui qu’ils jouaient à cette époque.
Les Iraniens furent sans doute les premiers créateurs du Bâd-gîr, signifiant capteur de vent en persan. Cet élément traditionnel de l’architecture fut très utilisé pendant des siècles afin de supporter l’étouffante chaleur estivale des régions les plus désertiques du pays. Etant donné son efficacité pour rafraîchir les maisons, les Iraniens l’intégrèrent dans leur habitat, ce qui induit le développement rapide d’un mode d’architecture propre aux provinces méridionales et centrales de l’Iran. Au fur et à mesure de l’augmentation du nombre des tours de vent, les Iraniens développaient davantage leur aspect esthétique en les ornant de briques décoratives et en créant des ouvertures en forme de jolis arcs.
Il faut également souligner que la ville antique de Yazd est connue en tant que "Ville des capteurs de vent" du fait de l’important nombre de Bâdgîr que l’on y trouve. Le jardin historique de cette ville nommé "bâgh-e-dôlat-âbâd" (le jardin de Dôlat-âbâd) est aussi célèbre car il abrite le plus haut Bâdgîr du monde dont la colonne octogonale atteint une hauteur de 34 mètres.
Les Bâdgîrs étaient généralement construits en forme de polygone régulier, notamment de tétragone et d’octogone. La hauteur de la colonne devait être supérieure à celle des autres éléments du toit et il fallait les faire remonter juste au-dessus du la "chambre du bassin". Au milieu de cette chambre se trouvait un ou plusieurs réservoirs d’eau établissant la connexion entre l’arrière cour et les chambres estivales.
Une fois que l’air a traversé la longueur, il entre en contact avec l’eau du bassin, située en dessous. Dès lors, l’eau entre en contact avec la chaleur de l’air et s’évapore. Cet échange de chaleur se traduit par une baisse considérable de la température de l’air qui est ensuite acheminé vers les chambres estivales. Pour les plus riches, la chambre du bassin était un espace fermé et séparé des chambres estivales, qui disposaient d’orifices semblables aux canaux de refroidissement intérieur ; ainsi, l’air frais était conduit là où l’on voulait.
En outre, le Bâdgîr était également employé dans les "yakhtchâl" ou refroidisseurs naturels pour le stockage de la glace mais aussi parfois de la nourriture. Un yakhtchâl, signifiant "stockage de glace", est un réfrigérateur ancien. Cette structure était un grand espace enterré jusqu’à 5000m3 qui avait des murs d’au moins deux mètres d’épaisseur à la base faite avec une mixture totalement imperméable. Cet espace était souvent relié à une source d’eau et possédait aussi souvent un Bâdgîr qui pouvait facilement rafraîchir les différentes pièces pendant les jours d’été.
Le jardin persan regroupe neuf jardins, choisis dans diverses régions d'Iran, qui représentent de façon matérielle les diverses formes que ce type de jardin paysager a pris au fil des siècles et dans des conditions climatiques différentes. Ils reflètent la flexibilité du Chahar Bagh, ou principe originel, du jardin persan, qui s'est perpétué immuablement sur plus de deux millénaires depuis sa première expression aboutie rencontrée dans le jardin de l'ensemble palatial de Cyrus le Grand, à Pasargades. Éléments naturels et artificiels se fondent dans le jardin persan pour créer une réussite artistique unique reflétant les idéaux des concepts artistiques, philosophiques, symboliques et religieux. Le jardin persan matérialise le concept d'Éden ou de paradis sur terre.
Le jardin persan représente un chef-d'œuvre du génie créateur humain. Le dessin du jardin persan, fondé sur l'angle droit et les proportions géométriques, est souvent divisé en quatre sections connues sous le nom de Chahar Bagh (Quatre Jardins). La création du jardin persan a été rendue possible par des solutions d'ingénierie innovantes et intelligentes et par un système de gestion de l'eau sophistiqué, mais aussi par le choix approprié de la flore et de sa localisation dans l'organisation du jardin. D'ailleurs, le jardin persan a été associé avec l'idée du paradis sur terre, offrant un contraste saisissant avec son environnement désertique.
Le jardin persan témoigne d'un échange d'influences considérable, puisqu'il a été la principale référence du développement de la conception de jardins en Asie occidentale, dans les pays arabes et même en Europe. C'est la géométrie et la symétrie de l'architecture, ainsi que le complexe système de gestion de l'eau, qui semblent avoir influencé la conception de tous ces jardins. Le mot paradis est entré dans les langues d'Europe depuis la racine persane « Pardis », nom désignant un beau jardin enclos derrière des murs.
Le jardin persan apporte un témoignage exceptionnel, et même unique, sur les traditions culturelles qui ont évolué en Iran et au Moyen-Orient pendant environ deux millénaires et demi. Tout au long de son évolution, le jardin persan a joué un rôle dans divers aspects culturels et sociaux de la société, devenant un élément central des résidences privées, des palais et des édifices publics, ainsi que des ensembles associés à des institutions bénévoles ou religieuses, tels que tombes, parcs, jardins palatiaux, Meidans, etc.
Le jardin persan est un exemple exceptionnel d'un type de jardin paysager réalisé en utilisant des éléments naturels et humains et en intégrant des réalisations significatives de la culture persane dans une expression physique et symbolique-artistique en harmonie avec la nature. Le jardin persan est d'ailleurs devenu un prototype pour l'organisation géométrique des jardins qui s'est diffusée dans le monde entier.
Le jardin persan est directement associé à des développements culturels d'une valeur universelle exceptionnelle, notamment des œuvres littéraires et poétiques, par exemple de Sa'di, Hafez et Ferdowsi. Le jardin persan est aussi la principale source d'inspiration pour le dessin de tapis et de textiles persans, la peinture de miniatures, la musique, les ornementations architecturales, etc. Dans l'Avesta, l'ancien livre sacré des zoroastriens, le jardin persan et ses plantes sacrées sont loués comme l'un des quatre des éléments naturels (la terre, le ciel, l'eau et les plantes). Le Chahar Bagh est un reflet de la perception mythique de la nature et de l'ordre cosmique aux yeux des anciens peuples iraniens.